Le Conseil Municipal de Saint-Omer en 1871
LE CONSEIL MUNICIPAL DE SAINT-OMER en 1871
1871, Une année difficile pour le Conseil Municipal de Saint-Omer.
La guerre complique la gestion financière.
Les susceptibilités peut-être irritées par le contexte.
C’est l’année des démissions, et des attaques personnelles.
Les 3 personnalités familiales, impliquées depuis des années dans la vie municipale, administrative ou associative, sont en première ligne pendant cette année mouvementée :
François Hermant-Bouquillon, 50 ans, cousin du député Louis Martel, 58 ans, 2 fois maire de Saint-Omer par interim en 1871.
Édouard Deneuville , 62 ans, banquier, cousin de Louis Martel
Alexandre Dambricourt , 37 ans, négociant, gendre de Fidéline Houzet et Géry Dambricourt.
Tous 3 conseillers municipaux régulièrement réélus.
Émile Houzet-Demolin, 33 ans, négociant, neveu de Fidéline Houzet et Géry Dambricourt et nouvellement élu au conseil municipal.
Le 17 janvier . Le maire de Saint-Omer Lefebvre du Prey démissionne, remplacé par Hermant-Bouquillon.
le Maire Lebevre du Prey démissionne pour conflit avec l’administration. Le sous-préfet lui demande le nom d’un remplaçant à Monsieur Deschamps de Pas décédé, pour l’administration des hospices. Le Maire propose M. Eudes. Le sous-préfet en choisit un autre. Le Maire s’estime méprisé (« vous ne deviez pas me demander des propositions pour les anéantir ni surtout sans m’en parler»). Il démissionne. M. Hermant-Bouquillon conseiller municipal devient maire par intérim.
Le 15 mars. Démission de Hermant-Bouquillon. Démission retirée après satisfaction.
Monsieur Hermant-Bouquillon, maire par intérim, a remis sa démission entre les mains de l’autorité. La décision de Monsieur Hermant aurait eu pour motif une nouvelle charge de logements militaires que l’on voulait imposer à la population, alors qu’un camp qui vient d’être nouvellement établi en partie, reste complètement vide. la position du maire était devenue intolérable. Les réclamations lui parvenaient de tous côtés.
Monsieur Hermant-Bouquillon ayant obtenu une satisfaction complète à l’égard du logement militaire, a retiré sa démission.
Le 30 avril. Élections municipales, M.Hermant-Bouquillon en tête.
« Les élections municipales se sont déroulées le 30. Ont été élus, en tête François Hermant-Bouquillon, Édouard Deneuville en 8ème position, Alexandre Dambricourt en 10ème position, Émile Houzet en 19ème position.»
« Il n’y a qu’une voix à St-Omer pour désigner comme chef de la future municipalité audomaroise, notre estimé concitoyen, M. Hermant-Bouquillon. Nous savons que M. Hermant n’est pas disposé à accepter ces fonctions, qu’il est si digne de remplir.
Le 12 mai. Constant Duméril maire.
Après un deuxième tour d’élections municipales le 7 mai, la nouvelle administration municipale est en place. M. Hermant-Bouquillon refusant la charge de Maire, M. Constant Duméril a bien voulu accepter la mairie. MM. Tible et Blondeau le seconderont en remplissant dans la municipalité les fonctions d’adjoints. MM. Duméril, Tible et Blondeau sont bien connus ici pour leurs opinions républicaines modérées.
Le 23 mai Installation du nouveau Conseil Municipal
et discours du Maire Constant Duméril. Son programme : Pas de politique au Conseil Municipal. La situation financière difficile de la ville. La religion sera respectée. Le problème de l’instruction publique à traiter. Des travaux publics nombreux à faire avec peu de moyens. La question des inondations périodiques qui ruinent les maraichers. Le plan cadastral à revoir. Tout ceci dans une magistrature temporaire.
Le 6 août Compte-rendu du voyage à Paris du Maire Duméril.
«Le conseil municipal s’est réuni extraordinairement, hier, à six heures du soir, pour entendre la lecture de l’exposé de Monsieur le Maire, à propos de sa visite et de celle des délégués du conseil à Paris, pour défendre les intérêts de la ville de Saint-Omer.
Nous nous sommes empressés de faire exposer immédiatement les documents que l’administration bien voulu nous communiquer sur cette importante question. Nos concitoyens verront avec quel dévouement et quelle vigueur Messieurs Duméril, Tible et Hermant-Bouquillon, énergiquement soutenus par Messieurs Martel et St-Malo, députés du Pas-de-Calais, ont soutenu la cause de la ville de Saint-Omer. »
Le 25 août. Conseil municipal. L’atmosphère se tend. Des querelles de personnes surviennent.
Monsieur Deneuville accusé par monsieur Devillers d’avoir dit au Maire : « qu’il ferait mieux de ne pas accepter les dons qu’on lui faisait pour les pauvres, afin de ne pas avoir à remercier les donateurs. » Il dément. Il est contredit.
Monsieur Thierry réclame que l’incident soit clos. « Il ne se passe pas de séance, dit-il, qui ne soit en partie consacrée à des questions personnelles. »
Monsieur Thelliez interpelle ensuite Monsieur Dambricourt qui dans la séance précédente avait fait à Monsieur le Maire des observations directes sur le voyage à Paris de la commission du chemin de fer de Boulogne, et sur les frais occasionnés par ce voyage.
Or Monsieur Dambricourt a fait des voyages à l’époque de la guerre lorsqu’il s’agissait de fonder à Saint-Omer une fabrique de cartouches.
L’ancien conseil était si convaincu de cette vérité que les conseillers ne doivent pas être intéressés pécuniairement dans la gestion des affaires de la cité qu’il n’a pas voulu laisser payer à Monsieur Dambricourt les 3000 Fr. que l’affaire des cartouches avait fait perdre.
Monsieur Thelliez conclut que Monsieur Dambricourt était mal fondé à faire des observations sur le voyage de la commission.
Le 10 septembre. Querelle autour des frais de déplacement à Paris.
Une querelle semble s’installer au sein du conseil municipal à propos de frais de déplacement à Paris. Le mémorial : « Nous qui n’avons aucun parti pris dans cette question, pour tel ou tel conseiller, nous sommes bien loin d’approuver les attaques dont l’administration actuelle et les membres de la commission ont été l’objet, au sujet du voyage de Paris, où les intérêts de Saint-Omer ont été si bien défendus par Messieurs Duméril, Tible, Thellier et Hermant-Bouquillon, ainsi que par Messieurs Martel et de Saint-Malo députés. »
Le 18 septembre. Conseil Municipal avec examen du rapport de la Commission du Budget 1872
La commission du budget : « le bilan de la ville de Saint-Omer au mois de septembre 1871 nous offre un passif de 539 084 Fr. et un actif de 53 881 Fr.… La commission a été amenée naturellement à rechercher les sources de ce déficit.… »
Le 19 septembre. M. Duméril, maire, démissionne face aux conclusions de la Commission Budget.
L’administration de la mairie n’admet pas les conclusions et les préconisations de la Commission du Budget.
Monsieur Duméril, maire de Saint-Omer adresse à Monsieur le sous-préfet sa lettre de démission ainsi que celles de Messieurs Tible et Blondeau.
Monsieur Duméril, maire de Saint-Omer à Monsieur le Sous-Préfet. « Monsieur le Sous-Préfet, j’ai l’extrême regret de vous annoncer qu’à la date d’hier, forcés par les circonstances, Messieurs Tible, Blondeau et moi, avons donné devant le conseil réuni, notre démission motivée comme membre de l’administration municipale. Vous transmettant aujourd’hui copie de la déclaration que nous avons faite à cette occasion, je viens vous prier Monsieur le Sous-Préfet de vouloir bien accueillir favorablement la demande que j’ai l’honneur de vous adresser afin d’obtenir de Monsieur le Préfet du Pas-de-Calais, qu’il soit pourvu à notre remplacement. »
Déclaration au conseil. « Messieurs, c’est avec un profond sentiment de chagrin que mes adjoints et moi venons déclarer au conseil que dans la position qui nous est faite, il nous devient impossible de continuer à gérer les affaires de la ville. Chacun sait dans quelles conditions difficiles et en dépit de quelles répugnances personnelles nous sommes entrés à la mairie. En ce qui concerne la ligne de conduite que nous prétendions suivre, le but d’apaisement vers lequel nous tendions, je les ai clairement indiqués dans mon discours d’installation.… Nous aurons donc fait quelque chose, nous les administrateur d’un jour, et cependant quelques-uns nous accusent de n’avoir rien fait. Il est vrai de dire que nous n’avons rien abattu, tout au contraire nous voulions construire, et établir sur de solides bases quelque chose de bon et de durable. On ne nous l’a point permis ! Signé : Le Maire, Constant Duméril, Blondeau et Charles Tible, adjoints »
23 septembre : La ville découvre le rapport du budget.
« On s’occupe beaucoup en ville du document distribué hier par la Commission du Budget. Nous apprécierons tour à tour les diverses parties de ce document, en commençant par les articles qui divisent le plus l’opinion. La question du retrait des indemnités de logement des vicaires inscrite dans le rapport de la commission a fait beaucoup de bruit. … »
Le 27 septembre. Lefebvre du Prey appelle à la démission collective.
« Au conseil municipal : Monsieur Lefebvre du Prey dit que devant le projet de budget de la commission qui a entraîné la démission de l’administration municipale il y a lieu de donner une démission collective et d’en appeler aux suffrages des électeurs. »
Le 3 octobre. La Commission du Budget prend acte de son désaccord avec le Maire et ses adjoints.
Les membres de la commission du budget prennent acte du désaccord du Maire et de ses adjoints avec leurs propositions et souhaitent qu’ils démissionnent, et qu’une fois délivrés des fonctions administratives ils puissent approuver les propositions de la commission.
« Monsieur le Maire… Nous croyons donc, qu’il serait urgent de laisser à l’administration supérieure, le soin de former une administration provisoire, qui présiderait à la discussion du budget et permettrait à chacun d’affirmer par son vote ses véritables opinions. Dans l’espoir que vous et Messieurs les adjoints approuveront nos observations, nous vous prions d’agréer, Monsieur le maire, l’assurance de notre considération la plus distinguée, signé : Lambert-Brunet, Pidoux Thibaut-Royer, Derbesse, Émile Houzet… »
Le 5 octobre. :La majorité demande le départ immédiat du Maire et des adjoints.
« Nous avons reçu de Monsieur Thibaut-Royer, rapporteur de la Commission du Budget la correspondance suivante, échangée entre une partie du conseil et l’administration, à l’occasion de la crise municipale.
Il en résulte que la majorité demande le départ immédiat du maire et des adjoints, avant la discussion du budget et la nomination d’une municipalité provisoire. Or, on sait qu’elle est à cet égard, la pensée de l’administration supérieure qui veut attendre, au contraire, le vote du budget pour connaître le courant de l’opinion et la majorité du conseil. Comment les choses s’arrangeront-elles ? Le maire et les adjoints n’attendent que le moment de se retirer ; ils voudraient déjà avoir repris leur place de simples conseillers, ils ne cessent de le dire, car leur position actuelle n’est pas des plus agréables. Que l’on nomme donc une administration provisoire, on rendra un grand service aux administrateurs dont le dévouement reste… » Le Mémorial
5 octobre. L’équipe du maire explique les raison de son retrait.
Hôtel de ville. « Messieurs, vous nous avez fait l’honneur de nous écrire une lettre collective, dans laquelle vous nous dites que vous souhaitez vivement que l’administration municipale se retire avant la discussion du budget. Nous n’avons pas attendu cette lettre pour presser l’administration supérieure de pourvoir à notre remplacement, et nous ne demandons depuis longtemps qu’une chose, être relevés d’un poste ou le devoir seul nous retient et qui depuis longtemps est devenu bien pénible.
Permettez-nous toutefois de vous faire observer que votre lettre contient une inexactitude involontaire sans doute, vous dites que, à diverses reprises nous vous avons déclaré qu’en qualité d’administrateurs nous ne pouvions accepter les propositions de la commission, et que ne voulant pas vous combattre, nous nous serions abstenus. Cela est exact, mais vous ajoutez : plus tard, vous vous êtes décidés à donner votre démission pour reprendre votre liberté d’action, et vous déclarez que vous ne pouviez qu’applaudir à cette décision.
Ce n’est pas plus tard, c’est au moment même de cette déclaration et bien avant le dépôt du rapport que nous vous avons fait connaître qu’en présence de propositions, les unes impraticables suivant nous, d’autres inopportunes, presque toutes enfin dénotant une véritable défiance envers notre administration, nous étions décidés à nous retirer.
Loin d’avoir applaudi, comme vous le faites maintenant, à cette détermination vous l’avez sévèrement blâmée dans une lettre signée par vous tous et publiée dans les journaux. Quoi qu’il en soit, nous envoyons immédiatement copie de votre lettre à Monsieur le sous-préfet, afin qu’il avise. Comme il faut que les affaires se fassent, nous convoquons néanmoins le conseil municipal pour mardi prochain. Il est impossible d’attendre plus longtemps. Recevez, Messieurs, etc. Pour le maire de Saint-Omer, signé Tible, adjoint.»
le 5 octobre. Le Sous-préfet refuse la démission du Maire.
Hôtel de ville. « Monsieur, nous avons l’honneur de vous faire connaître que Monsieur le sous-préfet à qui nous avons adressé hier copie de la lettre que vous nous avez écrite collectivement, Messieurs les membres de la majorité et vous, en vue du retrait immédiat de l’administration municipale, nous a répondu qu’il croyait devoir s’opposer à ce que nous prissions cette mesure, nous demandant que l’administration ne se retirât qu’après le vote du budget.
Dans ces conditions, et par suite de l’opinion que nous vous avons précédemment exprimée, à savoir que nous nous trouvons engagés tant envers la population qu’envers l’autorité supérieure et qu’il nous devient impossible dès lors d’abandonner subitement les intérêts précieux qui nous sont confiés. Je vous renouvelle, Monsieur, l’assurance de mes sentiments distingués. Signé le maire de Saint-Omer, Constant Duméril. »
Le 10 octobre. M. Hermant-Bouquillon est chargé par le Sous-Préfet d’assurer l’intérim. Pour la 2ème fois, cette année.
Monsieur Duméril, maire, ainsi que Messieurs Trible et Blondeau, adjoint se sont définitivement retirés de la mairie.
« Conseil municipal, séance du 10 octobre 1871. Présidence de Monsieur Hermant-Bouquillon. Après l’appel nominal qui constate la présence de tous les conseillers municipaux, Monsieur Hermant-Bouquillon donne lecture d’une lettre de Monsieur le Sous-Préfet, le chargeant en conformité de la loi de 1855, de remplir provisoirement les fonctions de maire de la ville de Saint-Omer, par suite de la démission de Messieurs Duméril, Tible et Blondeau comme maire et adjoints.»
Le 11 octobre. Édouard Deneuville étrille le rapport de la Commission du budget.
Conseil Municipal . Long article de Édouard Deneuville, conseiller municipal, par ailleurs banquier, sur les comptes de la municipalité, qui démontre le caractère erroné du travail et des conclusions de la Commission du Budget qui avait conclu à une mauvaise gestion et à un fort déficit.
Monsieur Lambert, comme président de la commission du budget, croit devoir affirmer à Monsieur Deneuville que la commission n’a pas voulu faire de mise en scène, elle n’a voulu que réaliser le bien et faire connaître aux habitants la véritable situation financière de la ville. Il regrette, en conséquence, les vaines expressions dont Monsieur Deneuville s’est servi à tort suivant lui.
Monsieur Deneuville répond qu’il désire «qu’il soit bien entendu dans tout ce qu’il a dit, comme dans ce qu’il pourra dire encore à l’encontre des propositions de la commission du budget, qu’il ne saurait être question d’attaques personnelles : les personnes ne sont pas en cause dit-il et c’est pour cela même qu’il a dit que dans la rédaction de ce projet, la commission avait obéi à des préoccupations d’école. »
Le 10 octobre. Dumeril objet d’attaques du journal l’Indépendant.
La majorité du Conseil Municipal s’en indigne. « Si nous avons pris la parole dans cette circonstance, c’est que nous y avons été forcés par la brutalité et l’inconvenance des attaques dont un de nos collègues était l’objet de la part d’un journal hostile à toutes nos idées. »
Le 14 octobre. Et un duel pour compléter le chaos.
Dumeril est l’objet d’attaques récurrentes du journal l’Indépendant. Il apparait que Monsieur Octave de Laplane est l’auteur de l’article plus particulièrement incriminé.
« C’est ainsi que poussé à bout j’envoyais deux de mes amis Messieurs Lambert et Dervaux au bureau de l’Indépendant, afin d’obtenir de l’auteur des diatribes publiées contre moi, une réparation par les armes. Monsieur de Laplane désigna Messieurs Nadal et de Récicourt. »
Après quelques explications, ces messieurs animés d’intentions conciliatrices, remirent à Messieurs Lambert et Dervaux après l’avoir signée, l’attestation suivante :
« Messieurs de Récicourt et Nadal autorisés par Monsieur de Laplane déclarent à Messieurs Lambert et Dervaux, que dans la polémique sur l’administration municipale Monsieur de Laplane auteur de l’article de l’Indépendant en date du 12 courant, intitulé : « réponse à Monsieur le Maire », ne pouvait en aucune manière avoir l’intention de s’adresser à la personne de Monsieur Duméril et qu’il n’a eu d’autre intention que de traiter dans cet article les actes de Monsieur le Maire toujours dans le domaine public. »
Ces messieurs autorisés à cet effet par Monsieur de Laplane ont déclaré que celui-ci considérait Monsieur Constant Duméril comme un parfait honnête homme, qu’il n’avait jamais eu l’intention d’attaquer ni son honnêteté ni son honorabilité personnelles et qu’il croyait avoir usé de son droit contre l’homme public. Monsieur de Récicourt a même ajouté que connaissant personnellement l’honorabilité et le caractère de Monsieur Duméril il n’aurait pas consenti à être le témoin de Monsieur Laplane, s’il avait cru que celui-ci eut attaqué Monsieur Duméril dans son honneur, qu’en conséquence Monsieur de Laplane n’avait point à donner satisfaction à Monsieur Duméril. Les témoins de ce dernier ayant insisté, Messieurs de Récicourt et Nadal ont prétendu qu’alors c’était Monsieur Duméril qui devenait l’offenseur et qu’ils réclamaient le choix des armes pour lui. Les témoins de Monsieur Duméril ont vivement protesté contre cette prétention ; suivant eux Monsieur Duméril est incontestablement l’offensé et le choix des armes lui appartient.
N’ayant pu s’entendre sur ce point, les témoins ont déclaré leur mission terminée et ont signé le présent procès-verbal. Fait à Saint-Omer le 14 octobre 1871.»
Et voilà ! le vaudeville est terminé.
Le 20 octobre. Démission de 3 membres de la Commission du budget.
Hermant-Bouquillon faisant fonction de maire, démission au conseil municipal de 3 membres de la commission : Devillers, Thelliez et Thierry. « … aujourd’hui que le déplacement des 3 conseillers qui formaient l’administration est un fait accompli, la situation a changé, je me trouve dans les rangs d’une minorité réduite à la stérilité. Les réformes incluses dans le rapport de la Commission du Budget devant finalement être renvoyées aux calendes grecques, ma présence au Conseil n’a plus de raison d’être. Signé Thierry.»
Le 24 octobre. Projet contre projet.
Au conseil municipal. « Monsieur Deneuville exprime le vœu, en son nom et en celui d’un grand nombre de ses collègues, qu’en présence de la publicité qu’a reçue le rapport de la Commission du Budget, la même publicité soit donnée au compte rendu des Travaux du Conseil en ce qui concerne le budget, afin que nos concitoyens puissent juger en connaissance de cause la conduite de leurs mandataires. Le conseil, après l’échange de quelques observations, décide que ce travail sera tiré à 300 exemplaires. »
Le 27 octobre. La Commission est devenue impuissante, réduite après les démissions.
Au Conseil municipal. « Monsieur Thibault demande la parole. Il fait connaître que par suite de la démission de trois de ses collègues, la Commission du Budget se trouve actuellement réduite à deux membres. Dans cette situation elle ne peut, ni discuter la suite de ces propositions, ni résoudre les questions qui lui ont été ou qui pourraient lui être envoyées. Il est forcé de remettre à d’autres temps la discussion du rapport. Monsieur le maire fait observer qu’il y a deux partis à prendre : compléter la commission si elle reste en fonction, ou renommer une nouvelle si elle se retire.»
Monsieur Deneuville croit que Monsieur Thibault définit bien la situation en disant que la commission abandonne ses propositions. Son travail, en effet, était un véritable projet de budget et non une simple critique de l’œuvre de l’administration. A deux ils ne veulent plus se charger de l’œuvre qu’ils avaient conçue à cinq. Qu’un membre du conseil reprenne pour son compte les observations de la commission, soit ! Mais la situation sera plus simple, le rapport n’étant plus soutenu on ne le discutera plus. Monsieur Thibault dit : « c’est bien là ma pensée. »
Le 15 novembre. Les administrés s’impatientent.
Le Mémorial : Un de nos concitoyens nous a remis hier soir la lettre suivante, sur la situation municipale. « Nous appelons sur cette lettre l’attention de l’autorité et celles de nos conseillers. Monsieur le rédacteur, la ville de Saint-Omer se trouve depuis trop longtemps déjà sans administration. Il importe donc à la presse locale d’insister vivement, comme vous l’avez fait pour faire cesser au plus tôt cet état de choses … »
Le 25 novembre, samedi. : Le Conseil Municipal se réunissent pour une solution à la crise.
« Samedi soir, les membres du conseil municipal ont eu une réunion officieuse, afin de trouver une solution à la crise municipale qui dure depuis longtemps déjà, et laisse en souffrance toutes les affaires de la cité. Cette réunion était présidée par Monsieur Hermant-Bouquillon.
Après une discussion qui a duré quelques instants, les membres présents ont décidé que l’on prierait l’autorité de réunir les électeurs pour la nomination des membres manquants, au nombre de six.
Une pétition a été rédigée à cet effet et elle a été adressée à la préfecture. Cette commission de quatre membres se rendra à Arras afin de présenter à Monsieur le préfet les observations du conseil. »
Le 26 novembre. Les conseillers municipaux demandent des élections au Préfet.
Saint-Omer, « Monsieur le Préfet, nous venons appeler toute votre sollicitude sur la situation où se trouve aujourd’hui la ville de Saint-Omer. Vous le savez, Monsieur le Préfet, depuis déjà plus de deux mois, elle n’a plus de maire, ni d’adjoint. Les affaires municipales sont dirigées à titre purement provisoire par des conseillers délégués. Ceux qui ont accepté momentanément ces fonctions ont hâte de les résigner, et tous les efforts tentés pour constituer une nouvelle administration définitive ont échoué devant les conditions d’incertitude qui se rencontrent dans un conseil municipal réduit de 27 à 21 membres. Des élections partielles, en complétant le conseil, peuvent seules, nous en avons la conviction, offrir la chance de donner à des hommes dévoués un terrain assez solide … Signé, les conseillers municipaux. »
Le 28 novembre. « Par dépêche reçue il y a un instant, Monsieur le secrétaire général de la préfecture du Pas-de-Calais, charge Monsieur le sous-préfet de faire connaître aujourd’hui à Monsieur Hermant et à Messieurs les délégués du conseil municipal, qu’en l’absence de Monsieur le préfet, il ne pourrait prendre une décision définitive au sujet des élections partielles et qu’il leur serait reconnaissant de remettre leur voyage à Arras jusqu’au retour de Monsieur le préfet, c’est-à-dire dans une dizaine de jours. »
Le 1er décembre. Démission de M. Hermant-Bouquillon.
Le Mémorial.« Aucune décision n’a été prise par l’autorité supérieure, relativement à la nomination des membres manquants au conseil municipal. En présence de ce fait, Monsieur Hermant-Bouquillon ainsi que Monsieur Pidoux qui remplissent les fonctions provisoires de maire et adjoint, ont cru devoir déclarer qu’il ne pouvait continuer à administrer la ville, et à assumer la responsabilité du tort occasionné aux intérêts de la ville de Saint-Omer.
Nous ignorons quels sont les motifs qui guident en ce moment l’autorité supérieure, mais nous pensons qu’elle ne se rend pas bien compte de l’état de nos affaires municipales et de notre situation, lorsqu’elle hésite à faire appel aux électeurs, pour compléter le conseil et pour former ensuite une administration. Il est nécessaire pourtant que la ville de Saint-Omer sorte de la position fausse où elle se trouve actuellement, et le devoir de l’autorité est de prendre des mesures à cet égard. »
Le 6 décembre. M. Hermant-Bouquillon démissionne.
Mercredi la préfecture demande d’attendre le retour du préfet pour décider de nouvelles élections, Hermant-Bouquillon se retire, Lefebvre du Prey prend provisoirement le rôle de maire par intérim
« Par suite de la réponse faite au conseil municipal de Saint-Omer par la préfecture, les affaires restent dans le statu quo. Nous avions espéré que tous les membres du conseil, imitant l’exemple de Monsieur Hermant-Bouquillon, aurait cherché à modifier la situation et à forcer l’autorité de prendre une décision, en refusant de remplir les fonctions de maire. Il paraît que tout le monde n’a pas été de cet avis, aussi trouvons-nous depuis hier, au bas des actes municipaux, la signature de Monsieur Lefebvre du Prey. Le provisoire de Monsieur Lefebvre du Prey durera-t-il longtemps ? Nous l’ignorons, mais nous espérons le contraire. »
Le 6 décembre. M. Hermant-Bouquillon justifie son départ et défend son bilan.
Nous avons reçu de Monsieur Hermant-Bouquillon, conseiller municipal, la lettre suivante. « Monsieur le rédacteur, il semblerait, d’après un article publié dans votre numéro de ce jour, qu’en cessant de remplir l’intérim de la mairie, j’aie voulu exercer une pression sur l’autorité à l’endroit de nos affaires municipales.
Telles n’ont pas été, je vous l’assure, mes intentions. Je ne me suis retiré que devant des impossibilités résultant de mes affaires personnelles, et, je suis certain que ceux de mes collègues qui ont, après moi, refusé le même mandat, n’ont cédé qu’à des motifs semblables. Nous venions de signer une pétition demandant à Monsieur le Préfet de nous faire sortir du provisoire par des élections complémentaires, et nous avions, comme nous avons encore, toutes raisons d’espérer que ce magistrat, aussitôt son retour à la préfecture, voudrait bien déférer à notre désir. Ce n’est pas, vous le comprendrez, en de telles circonstances que notre conduite eut pu être inspirée par la pensée de protestation que vous nous prêtez. Nous ne pouvons que remercier Monsieur Lefebvre du Prey d’avoir bien voulu, à la sollicitation de plusieurs d’entre nous, consentir à donner ses soins aux affaires de la cité jusqu’à ce qu’une administration définitive soit devenue possible. Permettez-moi d’ajouter, pour dissiper une de vos inquiétudes, que les intérêts de la ville, dans la question du chemin de fer de Boulogne, n’ont pas été aussi négligés que vous le pensez pendant ma présence à la mairie. J’ai eu, à ce sujet, plusieurs conférences avec Messieurs les officiers du génie et avec nos conseillers généraux. La question est en ce moment examinée au point de vue des intérêts stratégiques du pays. Le conseil général, en présence de cette étude si importante, a cru devoir lui-même ajourner sa décision, et la ville de Saint-Omer a tout lieu d’espérer que ses intérêts se trouveront ici d’accord avec ceux de la Défense nationale. En sollicitant de votre obligeance de vouloir bien insérer la présente lettre dans votre prochain numéro, je vous prie, Monsieur le rédacteur, d’agréer l’assurance de mes sentiments les plus distingués. Signé Hermant, conseiller municipal »
Le 9 décembre. : La préfecture décrète les élections municipales partielles pour les 24 et 31 décembre.
« le préfet du Pas-de-Calais, chevalier de la Légion d’honneur. Vu les lois des 5 mai 1855 et 14 avril 1871 sur l’organisation municipale. Vu la démission de Messieurs Devillers, Gravelle, Lambert-Brunet, Théliez et Thierry et le décès de Monsieur Bachelet, membres du conseil municipal. Vu la démission de Monsieur Duméril, Messieurs Blondeau et Tible des fonctions de maire et adjoints de Saint-Omer.
Considérant qu’aux termes de l’article 9 de la loi du 14 avril 1871, il doit être pourvu aux vacances existantes dans le conseil municipal avant de procéder à la nomination des maires et adjoints.
Arrête : article premier. Les électeurs de la ville de Saint-Omer sont convoqués pour le dimanche 24 décembre courant à l’effet de procéder aux élections partielles… »
Le 3 janvier 1872. Le 2ème tour des élections municipales partielles a eu lieu le 31 décembre. Sont élus Gavrelle, Cuvelier,Lambert, Blanvillain, Vandenbrouck, Thierry , représentants de la liste des républicains.
En principe la crise du Conseil municipal est terminée.